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14 novembre 2012 3 14 /11 /novembre /2012 21:04

33 à 6 ! De ma mémoire de passionné - aussi réputée soit-elle - je n'ai pas souvenir d'une victoire aussi franche face à une grande nation de l'hémisphère Sud. Alors ne boudons pas notre plaisir, et tentons de revenir sur les faits marquants de cette magnifique victoire sur l'Australie, samedi soir au Stade de France.

 

louis-picamoles.jpg

 

Comme les grandes équipes

Notre XV de France - qui arborait pour l'occasion sa nouvelle tenue Adidas, et ce pour notre plus grand plaisir - a donc battu un XV d'Australie deuxième au classement modial de l'IRB avant la rencontre, et deuxième du récent Four Nations entre les quatre nations majeures de l'Hémisphère Sud. Cette victoire est donc tout sauf une petite performance !

Mais au-delà de la victoire et du score, c'est aussi la manière avec laquelle l'équipe de France a mené le match qui nous a plu et sur lequel je vais revenir.

 

On a trouvé une équipe de France joueuse, qui met du volume de jeu, qui envoie la balle aux quatre coins du terrain et surtout aux ailes, avec une entame de deuxième mi-temps magnifique, et à la clé un essai de soixante mètre sur une relance de Michalak, et un service parfait pour envoyer Wesley Fofana à dame. Tout ce qu'on aime, le XV de France tel qu'il rend toute la planète ovale admirative.

On a aussi vu les Français dominer en conquête et notamment en mêlée, avec à la clé de nombreuses pénalités (5 à 0), deux essais et quelques véritables humiliations pour la pack australien. Tout ce qu'on aime là aussi.

 

Mais nos Bleux nous ont montrés des qualités beaucoup moins télégéniques, et beaucoup moins habituelles de leur part, mais tout aussi importantes à l'heure de comprendre les racines de ce succès, et surtout à l'heure de bâtir une équipe solide, capable de battre n'importe quelle autre nation du circuit, et de lancer la construction du groupe pour la Coupe du Monde 2015.

En premier lieu, on retiendra la possession du ballon, et les turn over. Les Français ont su enchainer des temps de jeu, déplacer le jeu d'un côté à l'autre du terrain, porter le ballon, tout en étant patients, et sans perdre le ballon au troisième temps de jeu ! A contrario, une excellente organisation défensive à la Toulonnaise (tiens tiens...) à permi aux bleus de grater plusieurs ballons dans les rucks : beaucoup d'agression par les deux ou trois premiers joueurs présents sur le ruck.

Autre motif de satisfaction nouveau, dont on n'a pas l'habitude, et certainement pas face aux nations du Sud : la domination dans les impacts ! C'est la première fois que je vois la défense française faire reculer de façon aussi nette des attaquants australiens, jusqu'à les rendre ridicules dans les vingt dernières minutes. Sans parler de Picamoles, Mermoz et consors qui avançaient dans la défense australienne. Ceci constitue une véritable révolution pour le rugby français.

On notera aussi le jeu au pied d'occupation, hyper juste : à la fois dans la technique (réalisé avec justesse), que dans les choix (utilisé avec justesse). On n'a jamais rendu inutilement la possession à l'adversaire, mais on ne s'est  jamais non plus obstiné à jouer à la main contre le court du jeu.

J'ai titré ce paragraphe "Comme les grandes équipes", et c'est cela qui me fait le plus l'affirmer : les Français ont su gérer la marque, et notamment marquer sous la domination. Comme l'Angleterre à la plus belle époque, comme les All Blacks, le Stade Toulousain, les grandes provinces irlandaises, et j'en passe : malgré une possession (40%) et une occupation (40%) largement déficitaires, les Français ont su lors de la première mi-temps marquer à chacune de leur venue dans le camp australien : un essai (12e), mais aussi au minimum une pénalité (5e, 37e) ou un drop (40e).

Gérer la marque, ça veut donc dire scorer lors du moindre temps fort, mais aussi courber l'échine et ne pas encaisser de point à chaque temps faible. Mises à part deux pénalités en début de match (9e, 22e) les Australiens n'ont jamais été en mesure de marquer le poindre point, et ont donc été fanny lors du second acte !

 

Les Leaders

Servat, Bonnaire et Nallet - les trois Grognards - à la retraite, Dusautoir, Yachvili et Harinordoquy blessés, Rougerie non retenu, on attendait l'émergence d'une nouvelle génération de leaders, joueurs souvent lancés par Marc Lièvremont lors des quatre dernières années, et désormais espérés matures pour mener le groupe. Et ils ont confirmé.

Lors de la première mi-temps déjà pleine de maitrise, je trouvais tous ces leaders de jeu ou de groupe bien dans leur match, mais pas étincelants au point de crever l'écran, de tirer le groupe vers le haut. A part le cinq de devant en mêlée qui broyait du jaune à tout va, ce n'était pas la grande euphorie.

Szarzewski, Mas et Papé étaient discrets dans le jeu, Yannick Nyanga et Fulgence Fufu Ouedraogo ne rayonnaient pas aux quatre coins du terrain, Michalak faisait le job et Mermoz était solide sans apporter de magie, Clerc était peu servi sur son aile. Seul Louis Picamoles était présent au four (le combat) et au moulin (le troisième rideau), et avançait de plusieurs mètres à l'impact, aussi bien en défense, qu'en attaque, impressionnant avec plusieurs joueurs accrochés à ses basques.

Mais à mieux y regarder, c'est la domination de ces hommes-là, appelés à être leaders, qui a apporté le terreau à la domination au planchot à la mi-temps (16-6) et au 17-0 en deuxième période. Après les citrons, on a vu tous ces hommes rayonner, dominer, avancer, et pour le coup briller, que ce soit dans la bataille des rucks et le combat (plusieurs ballons volés, des australiens sur le reculoir), qu'au large avec de superbes prises d'intervalles et situations dangereuses dont bien-sûr l'essai de Fofana sur une superbe inspiration de Fred Michalak.

En première mi-temps, tous ont été sérieux, appliqués, et dominateurs sans que ce soit impressionnant (à part en mêlée), pour ensuite s'ouvrir des intervalles en deuxième mi-temps.

 

Les deux vieux (plus de dix ans en Bleus pour eux deux) derrière ont bien tenu la barraque, Michalak dans le jeu, et Clerc au sein du groupe ; ainsi que Mermoz dans la dynamisation. Mention spéciale à Fred Michalak, qui nous revient muri, confiant, de son expérience aux Sharks de Durban en Afrique du Sud, tout en ayant gardé sa capacité à sortir un coup de génie, à rester imprévisible.

Dans un rôle de remplaçant qu'ils n'ont pas l'habitude de tenir, François Trinh-Duc et Morgan Parra ont su se mettre tout de suite au niveau d'excellence que l'équipe avait placé.

Devant, Nicolas le Bus Mas et Dimitri Szarzewski ont toujours avancés, et Papé a été le capitaine courage et modèle qu'on attendait de lui avec l'absence de Titi Dusautoir. Nyanga et Fufu ont quant à eux été des poisons pour les Wallabies, apportant en plus une présence physique que l'on ne pensait pas à ce niveau, qui a fait reculer les Australiens.

Domingo, entré à l'heure de jeu, a dépouillé les Wallabies en mêlée, à son meilleur niveau.

Mais c'est bel et bien à Louis Picamoles que j'aurais décerné le Talent d'Or si j'avais eu à choisir. Précis et habile techniquement, juste dans ses choix et son placement, il a en plus de tout ça montré une puissance de feu, celle de ses plus beaux jours, à laquelle une mobilité qu'on ne lui connaissait pas permet de constituer une véritable machine de guerre. Pourvu que ça dure...

 

Les nouveaux

Le changement de génération implique également l'arrivée de nouveaux, dont on attend qu'ils se mettent rapidement au niveau. Et on n'a pas été déçus. Très peu de faute de main ou d'erreur, tous ont été dans le tempo d'entrée.

 

Alors il y a les ex-nouveaux, dont Florian Fritz, qui a connu très peu de sélections en plus de huit ans, mais qui revient sur la pointe des pieds. Ultra solide en défense, percutant en attaque, match sans étincelle mais un sans faute.

Fofana a moins brillé à l'aile qu'il ne l'avait fait au centre lors du dernier Tournoi des VI Nations, mais il a bien compris l'essence du poste : être un finisseur, et mettre au fond la moindre occasion.

Devant, les deux ex-neo nouveaux Clermontois Benjamin Kayser et Vincent Le Belge Debaty ont formé avec Domingo une triplette auvergnate redoutable, présent dans le jeu et dominateurs dans le combat. On a même vu Kayser ouvrir sa courge et tenir un rôle de leader qu'on n'attendait pas.

Chouly, comme ses deux coéquipiers clermontois que je viens d'évoquer, a eu quelques chances ces dernières année en équipe de France sans jamais enchainer. Il a fait une entrée loin du niveau de Picamoles, mais sérieux.

 

Concernant les vrais nouveaux, issus du Millésime Saint-André, Yannick Forestier a fait des débuts remarquables, participant largement au concassage en règle de la mêlée australienne. Il a aussi été très disponible dan le jeu courant, et quand je dit courant, je pèse mes mots : trois belles courses pour autant d'interventions.

Jocelino-Suta-copie-1.jpgEn deuxième ligne, Jocelino Suta (de même que Sébastien Vahaamahina lors de sa rentrée) a été impressionnant, faisant preuve d'un registre hyper complet : plaquage, course/replacemement, combat, rucks, mêlée, présence dans le jeu... Pour une première sélection, il n'avait en face de lui qu'un monstre sacré du rugby mondial à plus de cent sélections, excusez du peu, en la personne de Nathan Sharpe. Rien pour l'impressionner, il a foncé, et gagné !

 

Quand aux deux jeunots de l'épine dorsale 2-8-9-10-15, Brice Dulin et Maxime Machenaud, on avait tout simplement l'impression de voir des mecs à la trentième sélection : à la fois à l'aise dans la prise de décision et la gestion des temps forts / temps faibles, et culotés sur certains ballons... On devrait les revoir, même si la concurrence est rude à leur poste.

 

And now ?...

Des belles victoires, on en a déjà vécues, mais on connait les maux du rugby français : au moment de la confirmation, c'est souvent la désillusion. Alors non seulement l'enjeux est important face à l'Argentine dès samedi (puis aux Samoas le 24/11), mais on attend du XV de France qu'il nous montre que ses ambitions d'excellence ne sont pas vaines.

En effet, la France vise une des quatre premières places du classement IRB, puisque les tirages au sort des groupes du prochain mondial (England 2015) auront lieu le 3 décembre, et que pour être dans le premier chapeau, il faudra être dans les quatre premiers au classement mondial ce jour-là, soit à la suite de la tournée d'automne. Avec leur victoire face à l'Australie, située trois places devant eux avant la rencontre, les Français ont marqué suffisamment de points pour passer devant les Anglais, et se retrouvent désormais quatrième. Mais une défaite à domicile face à une équipe d'Argentine moins bien classée (7e) ferait perdre trop de points aux Bleus pour espérer rester dans le quatuor de tête ; ça a l'air compliqué comme ça, mais les explications sont claires.

 

Alors rendez-vous samedi soir pour la deuxième levée des Bleus lors de ces tournées d'automne, face à l'Argentine, au Grand Stade de Lille-Métropole. On sait les Pumas très habiles pour brouiller les cartes, et faire perdre toute confiance à une équipe qui était entrée sur la pelouse en confiance, justement. Cet adversaire est donc un excellent indicateur pour savoir si le visage montré par le XV de France samedi face aux Wallabies était un accident de parcours ou une nouvelle vérité !...

 

PS : Merci au Midi Olympique pour les chiffres...

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commentaires

F
<br /> Pourvu que ça dure! Wait and see avec les pumas si on a de la graine de campeon del mundo dans cette équipe, inch allah! (qui serait plus grand avec du saucisson à mon humble avis)<br />
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